Maîtriser les dispositions réglementaires des marchés de maîtrise d’œuvre Abonnés
A - La loi MOP n° 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'œuvre privée
La loi MOP organise les attributions de la maîtrise d’ouvrage et de la maîtrise d’œuvre dans le cadre de la commande publique.
1 - Les obligations de l’acheteur public
L’acheteur public, en sa qualité de maître de l'ouvrage, est le responsable principal de l'ouvrage. Après s'être assuré de la faisabilité et de l'opportunité de l'opération envisagée, d'en déterminer la localisation, d'en définir le programme, d'en arrêter l'enveloppe financière prévisionnelle, d'en assurer le financement, l’acheteur public doit choisir le processus selon lequel l'ouvrage sera réalisé et conclure, avec les maîtres d'œuvre et entrepreneurs qu'il choisit, les contrats ayant pour objet les études et l'exécution des travaux (art. 2, loi MOP).
Précision : lorsque plusieurs maîtres d'ouvrage sont simultanément compétents pour la réalisation, la réutilisation ou la réhabilitation d'un ouvrage ou d'un ensemble d'ouvrages, ils peuvent désigner, par convention, celui qui, parmi eux, assurera la maîtrise d'ouvrage de l'opération. Cette convention précise les conditions d'organisation de la maîtrise d'ouvrage exercée et en fixe le terme.
2 - La notion de programme
En commande publique, la définition des besoins est une étape essentielle pour un achat efficient et respectueux de l’utilisation des deniers publics ; en matière de maîtrise d’œuvre, l’acheteur public définit ses besoins dans le cadre d’un programme. Ainsi, il définit dans ce cadre les objectifs de l'opération et les besoins qu'il doit satisfaire ainsi que les contraintes et exigences de qualité sociale, urbanistique, architecturale, fonctionnelle, technique et économique, d'insertion dans le paysage et de protection de l'environnement, relatives à la réalisation et à l'utilisation de l'ouvrage (art. 2, loi MOP).
Précisions :
Avant tout commencement des études de projet, l’acheteur public peut préciser le programme et l'enveloppe financière prévisionnelle, définis avant tout commencement des avant-projets.
Lorsque l’acheteur public envisage de réutiliser ou de réhabiliter un ouvrage existant, il peut poursuivre l'élaboration du programme et la détermination de l'enveloppe financière prévisionnelle pendant les études d'avant-projets. Lorsque l’acheteur public modifie le programme et l’enveloppe financière, il doit établir un avenant au marché de maîtrise d’œuvre.
Conseil : recourir à un programmiste. Le programme étant un élément fondamental d’un marché de maîtrise d’œuvre, l’acheteur public a tout intérêt à faire appel à un programmiste à qui il peut confier les études nécessaires à l'élaboration du programme et à la détermination de l'enveloppe financière prévisionnelle. Le programmiste peut être une personne publique ou privée (art. 2, loi MOP).
3 - Le cas particulier de la convention de mandat
Dans la limite du programme et de l'enveloppe financière prévisionnelle qu'il a arrêtés, et par le biais d’une convention de mandat, l’acheteur public peut confier à un mandataire l'exercice, en son nom et pour son compte, de tout ou partie des attributions suivantes de la maîtrise (art. 3, loi MOP) :
1° définition des conditions administratives et techniques selon lesquelles l'ouvrage sera étudié et exécuté ;
2° préparation du choix du maître d'œuvre, signature du contrat de maîtrise d'œuvre, après approbation du choix du maître d'œuvre par le maître de l'ouvrage, et gestion du contrat de maîtrise d'œuvre ;
3° approbation des avant-projets et accord sur le projet ;
4° préparation du choix de l'entrepreneur, signature du contrat de travaux, après approbation du choix de l'entrepreneur par le maître de l'ouvrage, et gestion du contrat de travaux ;
5° versement de la rémunération de la mission de maîtrise d'œuvre et des travaux ;
6° réception de l'ouvrage et accomplissement de tous actes afférents aux attributions mentionnées ci-dessus.
C’est le mandataire qui représente l’acheteur public à l'égard des tiers ; le mandataire peut agir en justice.
4 - Le périmètre d’intervention du maître d’œuvre
L’acheteur public peut confier au maître d'œuvre tout ou partie des éléments de conception et d'assistance suivants (art. 7, loi MOP) :
1° les études d'esquisse ;
2° les études d'avant-projets ;
3° les études de projet ;
4° l'assistance apportée au maître de l'ouvrage pour la passation du contrat de travaux ;
5° les études d'exécution ou l'examen de la conformité au projet et le visa de celles qui ont été faites par l'entrepreneur ;
6° la direction de l'exécution du contrat de travaux ;
7° l'ordonnancement, le pilotage et la coordination du chantier ;
8° l'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement.
Précision : le montant de la rémunération du maître d’œuvre tient compte de l'étendue de la mission, de son degré de complexité et du coût prévisionnel des travaux (art. 9, loi MOP).
B - Le décret n°93-1268 du 29 novembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'œuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé
Ce décret détaille le contenu des missions de maîtrise d'œuvre confiées par contrat à une personne de droit privé ou à un groupement de personnes de droit privé, en vue de réaliser des ouvrages, qu’il s’agisse d'ouvrages de bâtiment ou d'ouvrages d'infrastructure.
1 - Les missions de maîtrise d’œuvre pour des ouvrages de bâtiment
Les études d’esquisse
Les études d'esquisse ont pour objet de proposer une ou plusieurs solutions d'ensemble et de vérifier la faisabilité de l'opération.
Les études d’avant-projet
Ces études comprennent des études d'avant-projet sommaire et des études d'avant-projet définitif. Précision : elles comprennent également l'établissement des dossiers et les consultations relevant de la compétence de la maîtrise d'œuvre et nécessaires à l'obtention du permis de construire et des autres autorisations administratives ainsi que l'assistance à l’acheteur public au cours de leur instruction.
Les études de projet
Les études de projet ont, entre autres, pour objet de préciser les formes des différents éléments de la construction, la nature et les caractéristiques des matériaux et les conditions de leur mise en œuvre et d'établir un coût prévisionnel des travaux décomposés par corps d'état, sur la base d'un avant-métré.
L'assistance apportée à l’acheteur public pour la passation du marché de travaux
L'assistance apportée à l’acheteur public pour la passation du marché de travaux sur la base des études qu'il a approuvées a notamment pour objet de préparer la consultation des entreprises, en fonction du mode de passation.
Les études d'exécution permettent la réalisation de l'ouvrage
Elles ont notamment pour objet d'établir tous les plans d'exécution et le calendrier prévisionnel d'exécution des travaux par lot ou corps d'état.
La direction de l'exécution du marché de travaux
Elle a pour principale mission de s'assurer que les documents d'exécution ainsi que les ouvrages en cours de réalisation respectent les dispositions des études effectuées.
L'ordonnancement, la coordination et le pilotage du chantier
Leur objet consiste notamment à harmoniser dans le temps et dans l'espace les actions des différents intervenants au stade des travaux.
L'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement.
Elle organise les opérations préalables à la réception des travaux et d'assurer le suivi des réserves.
Mission de base pour les ouvrages de bâtiment (article 15)
« Pour les opérations de construction neuve de bâtiment, la mission de base comporte les études d'esquisse, d'avant-projet, de projet, l'assistance apportée au maître de l'ouvrage pour la passation des contrats de travaux, la direction de l'exécution du contrat de travaux et l'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement.
Font également partie de la mission de base l'examen de la conformité au projet des études d'exécution et leur visa lorsqu'elles ont été faites par un entrepreneur et les études d'exécution lorsqu'elles sont faites par le maître d'œuvre.
Pour les opérations de réutilisation ou de réhabilitation de bâtiment, la mission de base comporte les études d'avant-projet, de projet, l'assistance apportée au maître de l'ouvrage pour la passation des contrats de travaux, la direction de l'exécution du contrat de travaux et l'assistance apportée au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception et pendant la période de garantie de parfait achèvement.
Font également partie de la mission de base l'examen de la conformité au projet des études d'exécution et leur visa lorsqu'elles ont été faites par un entrepreneur et les études d'exécution lorsqu'elles sont faites par le maître d'œuvre. »
2 - Les missions de maîtrise d’œuvre pour des ouvrages d’infrastructure
Les études préliminaires
Dans le cadre d’une construction neuve, les études préliminaires ont pour objet de préciser les contraintes physiques, économiques et de vérifier la faisabilité de l'opération.
Les études de diagnostic
Dans le cadre d'une opération de réutilisation ou de réhabilitation, les études de diagnostic permettent de renseigner l’acheteur public sur l'état de l'ouvrage et sur la faisabilité de l'opération.
Les études d'avant-projet
Elles ont notamment pour objet de confirmer la faisabilité de la solution retenue et d'en déterminer ses principales caractéristiques ; elles permettent à l’acheteur public de prendre ou de confirmer la décision de réaliser le projet, d'en arrêter définitivement le programme et d'en déterminer les moyens nécessaires, notamment financiers.
Les études de projet
Elles ont principalement pour objet de préciser la solution d'ensemble et les choix techniques, architecturaux et paysagers et d'établir un coût prévisionnel des travaux.
L'assistance pour la passation du ou des contrats de travaux
L'assistance pour la passation du ou des contrats de travaux sur la base des études approuvées a pour objet de préparer la consultation des entreprises et d'analyser les offres des entreprises.
Les études d'exécution
Elles permettent d'élaborer les schémas fonctionnels, les notes techniques et de calcul qui précèdent et commandent celles des plans d'exécution et d'établir tous les plans d'exécution.
3 - La notion de contrat de maîtrise d'œuvre
Le contrat de maîtrise d’œuvre précise le contenu de la mission et indique les modalités selon lesquelles la rémunération du maître d'œuvre est fixée.
Précision : au plus tard avant le commencement des études de projet, le contrat doit indiquer le mode de dévolution des travaux retenus : entrepreneurs séparés, entreprises groupées, entreprise générale ainsi que son incidence sur le contrat.
Le contrat de maîtrise d’œuvre précise notamment les modalités de rémunération forfaitaire du maître d'œuvre. Cette rémunération décomposée par éléments de mission tient compte :
a) de l'étendue de la mission, appréciée notamment au regard du nombre et du volume des prestations demandées, de l'ampleur des moyens à mettre en œuvre, du mode de dévolution des travaux, des délais impartis et, le cas échéant, du ou des engagements souscrits par le maître d'œuvre de respecter le coût prévisionnel des travaux ;
b) du degré de complexité de cette mission, apprécié notamment au regard du type et de la technicité de l'ouvrage, de son insertion dans l'environnement, des exigences et contraintes du programme ;
c) du coût prévisionnel des travaux basé soit sur l'estimation prévisionnelle provisoire des travaux établie par le maître d'œuvre lors des études d'avant-projet sommaire, soit sur l'estimation prévisionnelle définitive des travaux établie lors des études d'avant-projet définitif.
Précision : dans le cas où le coût prévisionnel des travaux n'est pas encore connu au moment de la passation du contrat avec le maître d'œuvre, le montant provisoire de la rémunération se base sur la partie affectée aux travaux de l'enveloppe financière prévisionnelle fixée par l’acheteur public.
Le contrat de maîtrise d'œuvre précise, d'une part, les modalités selon lesquelles est arrêté le coût prévisionnel assorti d'un seuil de tolérance, sur lesquels s'engage le maître d'œuvre, et, d'autre part, les conséquences, pour celui-ci, des engagements souscrits.
Les notions d’engagement du maître d’œuvre et de seuil de tolérance
Lorsque la mission confiée au maître d'œuvre comporte l'assistance au maître de l'ouvrage pour la passation du ou des contrats de travaux, le contrat prévoit l'engagement du maître d'œuvre de respecter le coût prévisionnel des travaux arrêté au plus tard avant le lancement de la procédure de passation du ou des contrats de travaux.
Le respect de cet engagement est contrôlé à l'issue de la consultation des entreprises de travaux. En cas de dépassement du seuil de tolérance, le maître de l'ouvrage peut demander au maître d'œuvre d'adapter ses études, sans rémunération supplémentaire.
Attention : lorsque la mission confiée au maître d'œuvre comporte en outre la direction de l'exécution du contrat de travaux et l'assistance au maître de l'ouvrage lors des opérations de réception, le contrat prévoit également un engagement du maître d'œuvre de respecter le coût, assorti d'un nouveau seuil de tolérance, qui résulte des contrats de travaux passés par le maître de l'ouvrage. L’acheteur public doit contrôler le respect de cet engagement après exécution complète des travaux nécessaires à la réalisation de l'ouvrage en tenant compte du coût total définitif des travaux résultant des décomptes finaux et factures des entreprises.
Précision : en cas de dépassement excédant le seuil de tolérance fixé par le contrat de maîtrise d'œuvre, l’acheteur public doit réduire la rémunération du maître d'œuvre. Le contrat de maîtrise d'œuvre détermine les modalités de calcul de cette réduction qui ne peut excéder 15% de la rémunération du maître d'œuvre correspondant aux éléments de missions postérieurs à l'attribution des contrats de travaux.
Le cas particulier de la modification du programme
Lorsque l’acheteur public modifie le programme, il doit élaborer un avenant au contrat de maîtrise d'œuvre. Cet avenant arrête le programme modifié et le coût prévisionnel des travaux concernés par cette modification ; il adapte en conséquence la rémunération du maître d'œuvre et les modalités de son engagement sur le coût prévisionnel.
C – L’ordonnance n° 2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics (OMP) et le décret n° 2016-360 du 25 mars 2016 relatifs aux marchés publics (DMP)
1 - Concours (art. 8, OMP - art. 88 et 99, DMP)
Le concours est un mode de sélection par lequel l’acheteur public choisit, après mise en concurrence et avis d’un jury, un plan ou un projet, notamment dans le domaine de l’aménagement du territoire, de l’urbanisme, de l’architecture et de l’ingénierie ou du traitement de données.
Lorsque le concours est restreint, l’acheteur public établit des critères de sélection clairs et non discriminatoires des participants au concours. Le nombre de candidats invités à participer au concours est suffisant pour garantir une concurrence réelle.
Le jury examine les candidatures et formule un avis motivé sur celles-ci.
Précision : lorsque le concours est restreint, l’acheteur fixe la liste des candidats admis à concourir et les candidats non retenus en sont informés.
L’acheteur choisit le ou les lauréats du concours au vu des procès-verbaux et de l’avis du jury et publie un avis de résultats de concours.
Attention : l’acheteur public doit allouer une prime aux participants qui ont remis des prestations conformes au règlement du concours.
Le jury se compose exclusivement de personnes indépendantes des participants au concours.
2 - Les marchés de maîtrise d’œuvre (art. 90)
Les marchés publics de maîtrise d’œuvre ont pour objet l’exécution d’un ou plusieurs éléments de la mission définie par l’article 7 de la loi du 12 juillet 1985 (voir ci-dessus).
Lorsque le montant du marché de maîtrise d’œuvre dépasse 221 000 € HT, l’acheteur public soumis à la loi du 12 juillet 1985 doit recourir à la procédure du concours restreint.
Attention : l’acheteur public ne doit pas organiser un concours dans les 4 cas suivants (art. 90, DMP) :
1- pour l’attribution d’un marché public de maîtrise d’œuvre relatif à la réutilisation ou à la réhabilitation d’ouvrages existants ou à la réalisation d’un projet urbain ou paysager ;
2- pour l’attribution d’un marché public de maîtrise d’œuvre relatif à des ouvrages réalisés à titre de recherche, d’essai ou d’expérimentation ;
3- pour l’attribution d’un marché public de maîtrise d’œuvre relatif à des ouvrages d’infrastructures ;
4- pour l’attribution d’un marché public de maîtrise d’œuvre qui ne confie aucune mission de conception au titulaire.
Lorsque l’acheteur public organise un concours de maîtrise d’œuvre, il doit verser une prime aux opérateurs économiques qui ont remis des prestations conformes au règlement du concours
Précision : le montant de cette prime est égal au prix estimé des études à effectuer par les candidats affecté d’un abattement au plus égal à 20 %. L’acheteur public verse la prime sur proposition du jury (art.90, DMP). Lorsque l’acheteur n’organise pas de concours, il doit tout de même verser une prime aux participants qui ont remis des prestations conformes aux documents de la consultation ; dans ce cas, l’acheteur public détermine librement le montant de cette prime.
Dans tous les cas, l’acheteur public doit indiquer le montant de la prime dans les documents de la consultation.
Ludovic Vigreux le 02 novembre 2018 - n°71 de La Lettre des Marchés Publics et de la commande publique
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